Alors que tous les indices étaient au rouge (pollution de l'air, de l'eau, des sols) il est impressionnant de constater combien "l'arrêt" de l'Homme est bénéfique : l'air n'a jamais été aussi respirable à Paris depuis 40 ans, les oiseaux chantent à nouveau de toute leur gorge pendant que plus d'un tiers de la population mondiale est confinée, forcée de fait à plus de résilience et de sobriété. Aujourd'hui, intéressons-nous tout particulièrement à un aspect de cette pandémie mondiale : ses répercussions sur l'eau et les poissons.
Des répercussions directes
Les industries chimique et plastique sont à l'arrêt ou presque, le trafic fluvial et hauturier en baisse, les bateaux de croisières à quai. Le tourisme de masse ayant soudainement disparu, les canaux de Venise retrouvent leur clarté et les animaux leurs habitudes. Nous constatons et imaginons de suite les répercussions sur les milieux aquatiques et leurs habitants.
Les chalutiers géants de certains grands groupes industriels continuent leurs méfaits en mer du Nord ou dans le golfe de Gascogne, entrainant dans le même temps la colère légitime des pêcheur artisans, obligés de rester à quai pour cause de criées fermées. Cette situation ne devrait néanmoins pas durer car, s'il est encore possible pour de grands bateaux de stocker le résultat de leur pêche, encore faut-il pouvoir le débarquer. Nous allons donc assister à un net recul de la pêche industrielle ayant pour effet principal de préserver la ressource. Nous pouvons penser à tous ces bars pêchés au filet sur leur lieu de frai entre janvier et mars. Peut-être la situation permettra-t-elle aux poissons épargnés de trouver un second souffle.
La Fédération Nationale de la Pêche en France (FNPF) demande «de bien vouloir surseoir à tout acte de pêche de loisir durant la période de confinement»
Les alevins et les œufs épargnés
La saison de pêche à la truite ayant été lancée le 14 mars et le confinement de la population française officiellement prononcé le 17 mars à midi, les pêcheurs n'auront eu qu'un temps très restreint pour se rendre sur les berges des cours d'eau de première catégorie.
Nous savons qu'à cette période d'ouverture de nombreuses Fédérations ou Aappma sensibilisent leurs pêcheurs, les invitant à ne pas se déplacer dans l'eau. Effectivement, si la fraie de la truite débute en octobre pour prendre fin en janvier, à la mi-mars des œufs résiduels sont encore observés et pire, les alevins, produits de cette fraie, cachés sous les pierres ! Nous pouvons tout aussi bien faire référence à l'ombre commun dont la période de fraie s'étend de mars à mai. Cette pandémie aura certainement pour effet de préserver nos poissons sauvages et le fruit de leur reproduction.
Le sandre protégé
Il semblerait que la situation risque de se prolonger jusqu'en mai. Si tel est le cas, nous pourrions même envisager que perches et sandres puissent mener leur fraie sans encombre. Rappelons qu'effectivement, les dates de fermeture et d'ouverture de la pêche des carnassiers se basent uniquement sur les mœurs du brochet, faisant notamment du sandre une espèce très vulnérable au moment de l'ouverture. À cette période les mâles sont sur leurs nids, occupés à ventiler les œufs, protéger leur progéniture et disposés à attaquer tout ce qui la menacerait, y compris un leurre. Chaque année une large partie de la communauté de pêcheurs de l'hexagone s'indigne devant le relai de « gros titres » relatant des pêches de gros sandres exceptionnelles à l'ouverture… Un mâle prélevé sur un nid condamne des milliers d'alevins, et autant de potentiels futurs reproducteurs de l'espèce.
Au bout de 15 jours de confinement nous constatons une diminution de l'indice de pollution de jour en jour en même temps qu'un éclaircissement de l'eau. Espérons qu'à cette période de sobriété contrainte ne succèdera pas une phase de surconsommation, pour oublier, car tout ce qui aura été capitalisé sera perdu dans le même temps.