Le ciel est dégagé, le soleil chauffe, mais a déjà entamé sa descente depuis quelques heures lorsque j'arrive sur place. Je ne suis pas surpris de constater que le lac porte encore les stigmates laissés par la sécheresse de l'année 2017. Son niveau d'eau semble avoir perdu environ 4 mètres. Je ne dispose que de 2 heures 30 environ et malgré ses quelques milliers de m3 d'eau en moins, il n'en reste pas moins un terrain de jeu surdimensionné impossible à prospecter correctement en si peu de temps. Je prends donc le parti de marcher, d'observer scrupuleusement et de ne m'arrêter seulement sur les secteurs qui me semblent les plus prometteurs.
Le muret de la décroche
C'est donc 3 cannes dans une main, mon bakkan en bandoulière et mes lunettes polarisantes sur le nez que j'entame ma prospection. Je scrute donc les eaux du lac tout en progressant, à la recherche de cassures, de haut-fond, d'obstacles en tout genre pouvant tenir des poissons. Après 2-3 hauts-fonds pêchés rapidement je m'arrête sur un nouveau spot qui attire toute mon attention. Un petit muret de pierre, que le marnage du lac a laissé apparaître, entre dans l'eau jusqu'à se perdre dans les profondeurs du lac. Comme à mon habitude, je décide d'aborder le poste en employant une technique discrète. J'empoigne donc ma Finesse Puppeteer armée d'une tête plombée Wacky de 3,5 g sur laquelle est piqué un Flick Shake de 5,8''. Premier lancer le long du muret. Le montage touche le fond. Après quelques animations, je sens une première touche relativement discrète. Le lancer suivant ne donnera rien. Je n'insiste pas plus en wacky et troque la Finesse Puppeteer pour la Cranking Time lestée d'un Crusher coloris Black Shadow. Une nouvelle attaque plus franche survient au premier lancer, mais après quelques secondes de combat le poisson se décroche. Le lancer suivant ne donnera rien. Je quitte ce secteur dans un état d'esprit mitigé oscillant entre la satisfaction d'avoir déclenché un Bass et la petite déception de ne pas avoir mis au sec ce qui semblait être un très joli poisson. Néanmoins je suis bien décidé à repasser dans le secteur en fin de session.
Un lunker dans un arbre
Après quelques minutes de marche, je m'arrête à proximité d'un arbre mort, lui aussi mis à nu par la baisse du niveau d'eau. Je décide en premier lieu de peigner la pleine eau tout en scannant les différents étages de l'arbre. Alors que le scion de ma Cranking Time absorbe avec abnégation les vibrations de mon Crusher qui nage à 30 mètres de là par 3 mètres de fond, mon regard s'arrête sur une masse sombre, immobile et bien camouflée au cœur des branchages. Le rythme cardiaque s'accélère. La main gauche sur la manivelle du moulinet aussi. Je pose la canne au spinnerbait et attrape le montage wacky sans quitter ma cible des yeux. Je ne succombe pas à l'empressement et ne risque pas d'entrer un premier lancer trop technique. Premier lancer d'étalonnage prudent. Le leurre passe trop loin du poisson qui ne bouge pas. Deuxième lancer plus audacieux. Le Flick Shake arrive dans le champ de vision du poisson que je vois instantanément agiter sa caudale pour descendre sur sa proie. La bannière se décale. Je ferre. Il est au bout ! Dans le même temps, je me décale à la hâte sur la berge de manière à extraire le plus rapidement possible le poisson. La Finesse Puppeteer me démontre qu'elle en a dans le ventre, car s'imposer avec autorité face à un Lunker, qui a pour unique obsession le fait de retrouver ses branches, ne l'intimide pas le moins du monde. C'est en effet un Bass de 51 cm tout pile qui abdiquera au terme de ce combat ! Ayant prévu une grande bourriche flottante, je l'accroche à une des branches de l'arbre et y glisse le Bass. Ayant le sentiment d'avoir conjuré l'échec de tout à l'heure, je me remets en pêche bien motivé.
Le petit diable de la roselière
J'ai maintenant en ligne de mire une petite roselière située sur un haut-fond à 20 mètres de la berge. Un spot où il serait étonnant qu'un Bass n'ait pas trouvé refuge. Le Flick Shake ondule entre deux eaux puis tressaute sur le fond jusqu'au moment où je sens le - Poc ! - dans la ligne. La bannière se décale, je la mets en tension et contrains dans la foulée la canne à décrire un bel arc de cercle ! Le troisième poisson de la session est au bout ! Même si ce poisson est de taille plus modeste que le précédent le combat est très riche en sensations. Le petit diable vert accusera tout de même 42 cm sur la toise.
La luminosité commence à baisser et à en juger de la position du soleil il ne me reste que 30-40 minutes de pêche.
Le muret de la rédemption
Je prends donc la direction du premier spot, celui où j'ai perdu le joli poisson. Ce dernier ayant vu passer successivement un worm puis un spinnerbait, je décide de l'aborder autrement et de monter un jerkbait minnow. Je choisis pour cela le Rerange 130 SP coloris NF Ablette. Il ne faudra qu'un seul lancer et deux "twitches" pour décider ce poisson qui répondra à ma provocation par une touche violente et un combat puissant et lourd ! Je le tiens plus de 10 secondes donc suffisamment longtemps pour que l'espoir de le sortir grandisse autant que la peur de le décrocher. La Cranking Time me permet de contrôler le poisson avec autorité et la souplesse nécessaire pour absorber les rushes et les coups de tête. Assez rapidement le poisson est au sec et je reste quelques instants à contempler la beauté de mon deuxième Lunker de la session (validé à 53 cm !) et certainement un de mes plus jolis Bass à ce jour !
Je remplis d'eau mon bakkan pour assurer le transfert jusqu'à ma bourriche puis appelle Philippe pour une séance photos de circonstance. Philippe arrive quelques instants après téléphone dans une main, tablette dans l'autre. Les poissons passent rapidement l'un après l'autre devant l'objectif avant de retrouver leur élément.
Le soleil vient de passer derrière les collines. Il est temps de filer, Adrien, le premier client de la saison arrive dans peu de temps....