Pêcheurs artisans en mer et pêcheurs sportifs ne sont et ne seront jamais dos à dos. Les pêcheurs sportifs sont eux aussi soumis à des quotas et pour beaucoup, s'imposent à eux-même une éthique (catch and release, prélèvement raisonné) et ce dans une démarche claire : le respect et la préservation des espèces.
Mais la pêche au chalut pélagique, elle, n'est pas une pêche artisanale... C'est une pêche qui porte un nom : le pillage
Les pêcheurs artisans à quai
A l'heure où les petits artisans ont dû stopper leur activité, faute de possibilité d'écouler leurs stocks à un prix décent (les prix se sont effondrés, la quasi totalité des criées a dû fermer) et pour respecter les mesures de confinement imposées par le gouvernement français, certaines nouvelles attirent particulièrement l'attention. Depuis l'annonce du confinement des français, le secteur du poisson à Rungis a chuté de 85%, et même si les cours remontent doucement, le secteur reste très fortement fragilisé par la crise. Les premières victimes ? Les petits pêcheurs eux-mêmes, restés à quai.
Les industriels, eux, poursuivent leur activité, répondant à « l'effort d'activité nationale essentielle » voulu par le gouvernement français. Ainsi, le 22 mars 2020, dans les eaux du Golf de Gascogne, à quelques kilomètres de Bordeaux, quatre chalutiers géants ont été aperçus.
Quatre chalutiers géants de firmes néerlandaises
Ces chalutiers appartiennent à deux multinationales néerlandaises : Parlevliet & van der Plas et Cornelis Vrolijk, deux géants régnant sur l'industrie de la pêche européenne. A titre d'exemple, comme le précise l'association BLOOM, la compagnie France Pélagique possède elle aussi deux chalutiers géants et son ancien directeur général n'est autre qu'Antoine Dhellemmes, actuel vice président du Comité national des pêches (organisme encadrant la pêche alimentaire en France). Que penser alors du fait que France Pélagique est une filiale de Cornelis Vrolijk ? Pas de surprise donc à voir des chalutiers néerlandais dans les eaux françaises dans ce contexte, puisqu'ils y sont légalement autorisés.. Ce qui en revanche pose question, ce sont les mesures imposées aux artisans, aux petits pêcheurs qui ne peuvent prendre la mer et doivent rester sur la terre ferme pendant que les géants de l'industrie éventrent la mer.
Quelques chiffres comparés
Aucun abus de langage, les chiffres parlent d'eux-mêmes : un pêcheur artisan dispose d'un quota moyen de 200 kg de poisson par jour de pêche, là où un chalutier géant, d'une longueur de 100 mètres, est autorisé et équipé pour pêcher jusqu'à 400 tonnes de poisson par jour. Ces chiffres sont issus de l'Association Pleine Mer, qui lutte pour que soient reconnus et respectés les droits des pêcheurs.
500 zones mortes
L'heure n'est pas au débat sur la consommation de poisson mais bel et bien sur la raison d'être de ces méthodes de pêche. Plus de cinq cents « zones mortes », zones où la vie a disparu faute d'oxygène, ont été comptabilisées dans les eaux maritimes mondiales. Cinq cent zones où les stocks halieutiques ont été si épuisés (réchauffement climatique, surpêche, pollution plastique) qu'ils n'ont pu se renouveler, le phytoplancton ne pouvant pas lui-même jouer son rôle de puit de carbone et de régulateur des fonds marins. Des océans qui s'épuisent alors même qu'ils génèrent 50% de l'oxygène nécessaire à la vie sur Terre.
Cartographie des circuits courts de la filière pêche
Pour soutenir la pêche artisanale en période de covid-19, et pour toute l'année, il est possible d'acheter son poisson directement aux petits producteurs recensés sur cette page, par le biais d'une carte interactive :