Bonjour Thomas, ravi de pouvoir échanger avec toi. Peux-tu, comme il est de coutume, te présenter aux lecteurs de Peche.com Magazine ?
Thomas Caumartin – Salut Julien, je m'appelle Thomas Caumartin, j'ai 33 ans. Je suis natif de Villeneuve-sur-Lot dans le Lot-et-Garonne mais j'ai passé une grande partie de ma jeunesse au Pays Basque. Je suis maintenant de retour dans le Lot-et-Garonne où je suis imprimeur, en concubinage, papa d'un petit garçon de 5 ans et très bientôt d'un deuxième petit garçon !
Quelles sont les origines du projet Maison Ferrage ?
Thomas Caumartin – Initialement j'étais imprimeur de labeur dans l'imprimerie traditionnelle sur papier de ma compagne. Et puis l'idée de créer ma propre entreprise a trotté dans ma tête pendant un certain temps. C'est comme ça que Maison Ferrage a vu le jour en 2017. Constatant que la pêche végétait à la fois dans une image un peu vieillotte et qu'elle était dans le même temps encore trop inspirée par les US et le Japon, mon idée de base était de proposer, à mon niveau, une nouvelle image de cette pêche en France, une image qui nous correspond tout en valorisant le savoir-faire français.
L'imprimerie est donc vraiment la base de l'aventure ?
Thomas Caumartin – Tout à fait. C'était tentant de tester des créations maison. L'accueil a été rapidement positif, ce qui m'a motivé à lancer plus sérieusement la machine. Par la suite j'ai ouvert un petit atelier-boutique en colocation avec une décoratrice d'intérieur. Nous sommes parvenus à créer une chouette ambiance en réunissant nos deux univers. Cela nous a permis d'étoffer nos réseaux et notamment d'ouvrir le monde des poissons à des personnes qui n'y connaissaient rien initialement. L'univers de la pêche est finalement très graphique. Une belle opportunité de défendre notre loisir et de sensibiliser plus largement les gens à la nature.
Quelle volonté se cache derrière le fait d'avoir monté ce que tu nommes « un label créatif » ?
Thomas Caumartin – La notion de « Label créatif » est importante pour moi car depuis le début j'ai la volonté de ne pas être une simple marque de vêtements. J'ai pour ambition de développer des produits qui ne seraient pas uniquement vestimentaires. Je propose d'ailleurs, en plus des vêtements, des goodies, des toises, des leurres, etc. Le concept de label est un concept large à mon sens.
Plus qu'une entreprise, Maison Ferrage est un univers. Peux-tu nous en parler ?
Thomas Caumartin – L'univers Maison Ferrage est un univers assez large puisque je puise mon inspiration dans la vie de tous les jours. J'aime bien rebondir sur des faits d'actualité comme en témoigne la création d'un petit leurre que j'ai nommé le 49.3.
Nous avons dernièrement consacré un article au 49.3 que nous avons pu tester. Tu as certainement deux mots à nous dire sur la genèse de ce « Jigue Nageur » ?
Thomas Caumartin – Un jour j'ai eu l'idée, non pas de commercialiser ce leurre mais plutôt de le proposer à ma clientèle Maison Ferrage. La volonté était de créer un leurre plaisir qui s'adapte à plein de situations avec lequel on peut faire plein de figures ! La réussite de ce projet tient à la contribution d'un certain nombre de personne de mon entourage. Il y a Romain Maudet, qui m'a aidé à couler les têtes, mais aussi un de mes meilleurs amis, qui m'a aidé sur la conception graphique et mon beau-père qui a réalisé l'emballage sur une vieille machine d'après-guerre, une platine typographique. Dans le milieu de l'imprimerie on l'appelle la petite Reine.
La vocation de ce leurre est d'aller pêcher dans les obstacles, j'ai donc trouvé que 49.3 était un nom adéquat ! Le 49.3 qui passe en force, comme les lois… Et puis je l'ai appelé « Jigue Nageur » et pas « Swimming Jig » parce que je trouve rigolo de franciser tout ce lexique américain !
Concernant les coloris je ne voulais pas m'étendre et proposer deux de mes coloris fétiches permettant de couvrir beaucoup de situations : Black avec palette Gold et Chartreuse avec palette argentée. L'idée initiale était de proposer une série limitée avec un bel emballage et quelques goodies à l'intérieur mais étant donné le temps passé à le développer et le succès du leurre je vais poursuivre sa fabrication en conservant la numérotation des produits. Je trouve que ça les valorise à l'heure où les leurres arrivent massivement de Chine par conteneurs. C'est un leurre conçu initialement pour pêcher les carnassiers d'eau douce mais j'invite les gens à pêcher en mer avec, notamment pour le bar dans les coursives de roche ! Il est radical ! Je suis sûr qu'il est tout aussi efficace sur des spots bretons par exemple, au-dessus des laminaires.
Je travaille d'ailleurs actuellement sur de nouveaux coloris ainsi que sur une version plus adaptée au brochet en termes de taille et de coloris. J'en profite d'ailleurs pour lancer un appel à des investisseurs potentiels car j'ai encore beaucoup d'idées en tête !
Quel est le cœur de Maison Ferrage ?
Thomas Caumartin – Son cœur c'est tout d'abord ma famille qui me soutient depuis le début dans ce projet. Ensuite ce sont mes amis, que je ne pourrais pas tous nommer mais qui se reconnaîtront, qui m'entourent et m'appuient que cela soit par leurs conseils avisés ou par le simple fait de partager une session de pêche. Maison Ferrage est un pur produit sur Sud-Ouest et de l'art de vivre qui va avec. La famille et les amis sont des choses très importantes pour moi.
Et pourquoi ce nom ?
Thomas Caumartin – Tout simplement parce que « Maison » reflétait bien le travail à la française et « Ferrage » parce que l'acte de ferrer est ce qui motive la majorité des pêcheurs à aller à la pêche. Ça a donc du sens et une sonorité intéressante je trouve.
Doit-on voir une signification particulière dans ton logo ?
Thomas Caumartin – Ce logo a été conçu par mon ami Roman Szymanowicz et l'idée était de faire référence à la fois au pont de Villeneuve-sur-Lot et également au clocher d'Orellana, destination que j'apprécie particulièrement pour la pêche.
Les valeurs prônées par Maison Ferrage sont clairement affichées : « Passion », « Éthique », « Aventure ». Qu'est-ce que l'éthique pour toi ?
Thomas Caumartin – C'est une valeur globale qui va bien au-delà de la pêche. L'éthique c'est tenir une ligne de conduite qui s'articule autour de la notion de respect. J'aime l'idée que l'on soit irréprochable dans la vie comme au bord de l'eau. D'un point de vue professionnel cela passe, entre autres, par une sélection de mes textiles afin de faire en sorte qu'ils n'aient pas traversé la planète, une gestion des stocks assez stricte, une production à petite échelle, etc. J'essaie de travailler au maximum avec un système de pré-commande. Dans cette même dynamique je collabore aussi avec Don't Drop The Bass, un collectif de trois artistes qui ont décidé que la vente d'une partie de leurs œuvres permette de financer la valorisation et le rempoissonnement en black bass. J'apporte ma pierre à l'édifice en reversant 1€ de la vente de chacun de mes produits pour cela également.
On voit chez MF beaucoup de références aux 90's, que ce soit au niveau de la musique, du style vestimentaire, de la culture télévisée, etc. De quelle(s) culture(s) se réclame Maison Ferrage ?
Thomas Caumartin – Ma génération a été influencée par le Hip Hop et la culture Street que j'apprécie beaucoup. J'entretiens également un lien fort avec la nature. Je n'ai pas vraiment de ligne directrice, je me laisse bercé et influencé, que ce soit par l'univers photographique, musical, par l'actualité, etc. Je fais communiquer à la fois le passé et le présent. Je fais ce qu'il me plait.
Tu parlais du collectif Don't Drop The Bass. Le Black Bass occupe une place de choix dans ton univers, pourquoi ?
Thomas Caumartin – J'ai toujours été amoureux de ce poisson. Il était à l'époque encore bien plus présent qu'il ne l'est aujourd'hui dans le Sud Ouest. J'ai ce qu'on appelle ici « la fièvre ». J'ai la fièvre du black bass ! C'est à la fois le poisson le plus ludique à attraper pour un novice et le plus compliqué pour celui qui décide de lui consacrer une vie de pêcheur ! Une grande partie des techniques de pêche aux leurres sont issues de la pêche du black bass. Je pense qu'une fois qu'on en a attrapé un on veut tous les attraper ! J'ai le sentiment qu'il y a un basculement ou du moins une prise de conscience de l'intérêt que peut représenter ce poisson pour l'avenir de la pêche en France.
Quelles sont les perspectives de MF : Prochains projets, objectifs ?
Thomas Caumartin – J'aimerais diminuer mon activité de personnalisation textile pour les entreprises locales et également pour le milieu de la pêche afin de pouvoir me consacrer toujours plus au développement de Maison Ferrage et à la création. Un autre objectif que nous avons avec mon ami Brice (Greendevil) serait de mettre sur pied un projet commun.
Et sinon, c'est quoi cette histoire avec Oxmo Puccino ?!
Thomas Caumartin – Aaaah ! C'est ce qu'on appelle un coup du sort ! Une date de concert d'Oxmo Puccino était prévue à Villeneuve-sur-Lot et en tant que grand fan j'avais évidemment pris mes places. Le jour J une amie travaillant dans un restaurant m'avait prévenu qu'il y mangerait le midi. Étant un peu timide de nature, je n'ai pas osé aller le voir et me suis un peu défausser sur mon fils qui, comme la plupart des enfants, n'a peur de rien. Je savais qu'Oxmo Puccino était pêcheur donc j'ai donné à mon fils le seul autocollant Maison Ferrage que j'avais dans les poches et lui ai demandé d'aller le lui donner en lui précisant que c'était de la part de son papa ! 1h plus tard je reçois un coup de téléphone d'Oxmo qui me demandait s'il pouvait passer à l'atelier. D'un coup c'était la panique à bord, j'ai vérifié un peu tremblotant s'il y avait de l'eau dans la cafetière, ce genre de choses ! (rires) Et puis il est arrivé avec son régisseur qui est lui-même pêcheur et connaissais déjà l'univers Maison Ferrage. Au moment de leur ouvrir la porte je leur ai lancé un « J'ai réussi ma life ! » (rires) On a passé une super après-midi ensemble et le soir nous sommes allés au concert, mes potes et moi. Nous sommes restés en contact régulier depuis et Oxmo n'attend qu'une chose : pouvoir revenir pêcher le black bass sur le Lot !
Pour finir, aurais-tu une devise ou un message à faire passer ?
Thomas Caumartin – En ce moment je suis assez branché Old School et tatouage. Voici une devise qui me plaît et me décrit assez bien : « Vaincu mais non dompté ! » (rires)