Funeste été pour les cours d'eau français, l'industrie pointée du doigt

Pollution de l'Aisne par l'usine Nestlé de Challerange en Août 2020. © Le Parisien

L'été correspond à la période d'étiage des cours d'eau, c'est-à-dire celle durant laquelle ils atteignent leur niveau le plus bas. Cette année, il fut marqué par une sécheresse exceptionnelle, facteur aggravant qui laissera des stigmates, mais également par la mise en lumière de pollutions exceptionnelles liées à l'activité industrielle.

Juillet 2020 : Comté et la Loue

Fin juillet 2020, le journal Le Monde se faisait l'écho de la publication du bilan d'une étude menée entre 2012 et 2020 sur la Loue par le laboratoire Chrono-Environnement, le CNRS et l'Université de Franche-Comté, cofinancée par la région Bourgogne-Franche-Comté, le département du Doubs et l'agence de l'eau et qui avait pour but de :

  • définir l'état de la rivière
  • identifier les contaminants présents
  • hiérarchiser leurs impacts

En ressort que  l'origine de la pollution est multifactorielle, mais que le principal responsable est l'agriculture, représentée dans la région quasi exclusivement par la production de Comté. Ce qui est particulièrement mis en évidence ici est l'impact de l'intensification de l'agriculture sur les cours d'eau. La production de Comté a en effet bondi de 70% en 30 ans, laissant la Loue, rivière autrefois prisée des pêcheurs à la mouche, totalement eutrophe.

Les scientifiques soulignent néanmoins une prise de conscience d'une partie du monde agricole. Une dernière version du cahier des charges de l'obtention de l'appellation AOP rédigée par le CIGC (Comité Interprofessionnel de Gestion du Comté) est d'ailleurs en attente de validation par l'Europe.

Résultats de l'étude menée sur la Loue par le laboratoire Chrono-Environnement, le CNRS et l'Université de Franche-Comté.
Résultats de l'étude menée sur la Loue par le laboratoire Chrono-Environnement, le CNRS et l'UFC.

Août 2020 : Nestlé et l'Aisne

Depuis la mi-août, le groupe Nestlé est dans le viseur de la Fédération de pêche des Ardennes. En effet, le géant Suisse de l'agroalimentaire mondial est accusé d'être responsable d'une pollution massive de l'Aisne ayant entrainé la mort de plusieurs tonnes de poissons sur un linéaire de 7 km de long pour 30 m de large.

C'est une usine du groupe située à Challerange et spécialisée dans la fabrication de lait en poudre qui serait à l'origine de cette hécatombe. Si la direction de l'usine reconnaît "un déversement ponctuel et involontaire d'effluents de boue biologique" depuis sa station d'épuration, elle ne veut néanmoins pas être accusée hâtivement, arguant le fait que les boues ne contenaient aucun produit chimique et que des poissons ont été retrouvés en amont de la nappe de boue. La Fédération de pêche des Ardennes a porté plainte contre Nestlé et l'OFB (Office Français de la Biodiversité) poursuit actuellement des analyses de l'eau.

Pollution de l'Aisne par l'usine Nestlé de Challerange. © Le Parisien
Pollution de l'Aisne par l'usine Nestlé de Challerange. © Le Parisien

Septembre 2020 : Lafarge et la Seine

Mardi 1er et mercredi 2 septembre 2020, c'est Europe 1 qui pointait du doigt le groupe Lafarge, accusant le cimentier, preuve vidéo à l'appui, de déverser volontairement dans la Seine en plein Paris, les eaux usées de deux de ses usines.  En effet, les rejets constitués essentiellement de béton sous forme laiteuse, microfibres plastique et de liquide de traitement ont été observés sur les sites de Bercy et du Pont Mirabeau.

Là aussi, le groupe Lafarge reconnaît les faits, mais se défend de leur caractère délibéré, qualifiant ces rejets de "temporaires" et "résultants d'une détérioration externe délibérée d'une plaque d'étanchéité". Argument que réfute Jacques Lemoine, agent de développement de la Fédération interdépartementale pour la pêche et la protection du milieu aquatique, qui assure que cette pollution ne date pas d'hier puisque les pêcheurs l'avaient déjà signalée il y a plusieurs années. L'OFB et la Mairie de Paris ont porté plainte contre Lafarge.

Les cours d'eau sont un bien commun qu'il est essentiel de protéger. À nous pêcheurs de rester les sentinelles veillant à leur bonne santé. Si vous constatez une pollution d'un cours d'eau, rapprochez-vous de votre AAPPMA.

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