Bonjour Sylvain, peux-tu dans un premier temps te présenter aux lecteurs de Pêche.com ?
Je m'appelle Sylvain Garcia, je vis au bord de la Rivière d'Etel dans le Morbihan.
Je suis guide de pêche et skipper professionnel depuis 10 ans maintenant, après un début de carrière en tant qu'ingénieur dans l'industrie.
Originaire du Sud de la France, je vis en Bretagne depuis maintenant plus de 30 ans. J'ai toujours été passionné par la pêche, ayant eu la chance d'avoir un grand-père et un père qui m'ont très tôt emmené avec eux lors de leurs parties de pêche, et qui m'ont ainsi transmis cette passion et une sensibilité particulière pour les milieux naturels, les animaux, les oiseaux et bien sur les poissons. Ils ne sont malheureusement plus là, mais je leur suis infiniment reconnaissant d'avoir pris le temps de me transmettre ce précieux héritage.
J'ai pratiqué différents types de pêche, coup, carnassiers et carpe à mes débuts, puis quasi-exclusivement la pêche à la mouche (truite, carnassiers, mer) pendant mon adolescence. Puis énormément de pêche au leurre en mer depuis ces 25 dernières années (bar, lieu, pagre, thon, bref tout ce qui peut se prendre au leurre, et surtout en surface, qui reste pour moi la plus belle des techniques).
Pourquoi es-tu devenu guide de pêche ?
Comme je l'ai dit plus haut, après 15 ans passés à travailler dans l'industrie, j'avais un peu l'impression de tourner en rond dans un métier dont je ne voyais plus vraiment la finalité, avec toujours plus de contraintes et en profond désaccord avec moi-même. J'ai donc eu envie de donner un nouvel élan à mon parcours professionnel, en transmettant à mon tour cette passion et m'épanouir dans un métier qui m'offre maintenant une liberté incroyable et un environnement de travail exceptionnel. J'ai donc intégré la formation BPJEPS de Caulnes en 2014, et j'ai ensuite enchaîné en 2015 avec un Brevet de Capitaine 200 au lycée maritime d'Etel, juste à côté de chez moi.
Quels types de produits de guidage proposes-tu ?
Mon activité est essentiellement basée sur des sorties pêche au leurre en bateau, au départ de la rade de Lorient. Mon terrain de jeu s'étend de la Côte Sauvage de Quiberon, jusqu'à la limite du Finistère Sud au-delà du Pouldu, en passant bien entendu par l'Île de Groix, la Rivière d'Etel et sa tristement célèbre Barre.
Cette vaste zone offre ainsi une multitude de possibilités de pêche, mais elle est relativement technique à pêcher, notamment du fait de l'absence de gros courants, et donc de la difficulté à localiser les poissons et comprendre leurs déplacements. Je cible essentiellement le bar, mais également le lieu jaune, et différentes espèces de poissons pélagiques notamment en été (maquereau, maquereau espagnol, chinchard, bonite, etc…).
Mon approche est la plupart du temps basée sur des techniques plutôt légères (leurres souples, leurres de surface, cuillère notamment) dans des zones relativement peu profondes (moins de 10 m), ce qui permet de pouvoir relâcher la plupart des poissons dans les meilleures conditions. Je tente en effet de promouvoir des prélèvements raisonnés (entre 3 et 4 % seulement des bars capturés sont prélevés, en les valorisant au mieux grâce à la technique Ikejime, et en appliquant une fenêtre de capture entre 42 et 60 cm).
Mon brevet de commandement maritime me permet en outre de proposer des sorties d'observation de cétacés, nombreux sur les côtes morbihannaises, et de faire ainsi prendre conscience à un public plus large de la richesse, mais également de la fragilité des écosystèmes marins.
Qu'est-ce qu'être guide de pêche pour toi ?
C'est une vaste question qui mérite qu'on s'y attarde. Je le répète souvent aux stagiaires de la formation BPJEPS de Caulnes, pour laquelle j'interviens chaque année : être un bon pêcheur (si l'on peut se définir soit même ainsi sans faire preuve de vanité) ne fera pas de vous un bon guide de pêche.
Il faut en effet faire preuve d'écoute, de pédagogie, de patience, de diplomatie, mais également de rigueur, et avoir des compétences en gestion d'entreprise et en communication.
De plus, le métier de guide de pêche, ce n'est pas pêcher tout en étant rémunéré, comme s'imaginent beaucoup de gens. C'est un métier à part entière, avec beaucoup de moments de doute, d'interrogations, et de remise en question permanente. Le but est de transmettre un certain nombre de connaissances à vos clients, et de leur faire prendre du poisson en les mettant en pratique.
Il faut enfin être prêt à partager beaucoup de choses avec ses clients, et donc vos meilleurs spots, ce qui n'est pas une chose facile, surtout à l'heure actuelle où beaucoup de gens veulent tout, tout de suite et sans effort. Ce n'est pas facile de préserver sa zone de pêche à long terme.
Tu pêches ou pas lorsque tu es en guidage ?
C'est extrêmement rare, car je focalise toute mon attention et mon énergie sur mes clients, afin d'être à leur écoute, de leur apporter toute mon expérience, et de tenter de leur faire prendre un maximum de poissons.
Cela arrive cependant dans trois cas précis :
- Lorsque l'on me le demande, car il est parfois plus facile pour certaines personnes de comprendre et d'assimiler un geste technique (lancer, animation du leurre, travail du poisson) par l'imitation plutôt que par l'explication.
- Lorsque nous localisons des poissons au sondeur et que mes clients ne parviennent pas à les faire réagir malgré différentes approches. Je tente alors une animation différente ou un autre type de leurre pour essayer de trouver la clé. Et dans tous les cas, je repasse la canne à mon client si j'ai réussi à piquer un poisson. Cela permet également de regonfler le moral des pêcheurs si la pêche s'avère difficile.
- Lorsque l'on tombe dans une très grosse activité de chasse et que tout le monde s'éclate sur le bateau, cela m'arrive de faire un lancer ou deux pour profiter de la frénésie !
Que fais-tu lorsque tu ne guides pas ?
J'essaie de passer un maximum de temps en famille, pour rattraper le temps que je ne passe pas avec ma femme et mes enfants pendant les vacances d'été notamment.
L'hiver, pendant la saison creuse, je gère toute la partie comptabilité, communication, et prépare la prochaine saison avec mes différents partenaires.
Quel regard portes-tu sur le guidage en France ?
La situation est extrêmement contrastée, avec de très bons guides qui travaillent de façon très professionnelle et responsable, mais également de personnes qui ne sont pas du tout faites pour ça, et qui dégradent l'image de la profession. De plus la concurrence déloyale des pseudo-guides par l'intermédiaire des sites de cobaturage, phénomènes récurrents dans beaucoup de régions, ne facilite pas les choses.
Quel(s) conseil(s) aurais-tu à donner aux personnes qui souhaiteraient se lancer dans cette aventure ?
Avant de vous lancer, posez-vous les bonnes questions concernant la zone et le type de pêche que vous souhaitez pratiquer : le potentiel est-il suffisant pour vous permettre de travailler une bonne partie de l'année ? Y a-t-il déjà des guides de pêche en activité sur le secteur ?
Êtes-vous prêts à partager beaucoup de choses avec vos clients ?
Soyez conscients qu'il s'agit d'un métier très saisonnier, et qu'il n'est pas facile de concilier vie de famille et activité professionnelle (il n'est pas facile de partir en vacances en famille par exemple, notamment l'été). Oubliez les ponts et les jours fériés pour vos vacances !
Il s'agit enfin d'une activité très météo-dépendante. Vous serez parfois contraints d'annuler des semaines entières de guidage à cause de la météo.
En tant que pêcheur, quel est ton rêve ?
De pouvoir trouver le temps de parcourir le globe à la recherche des innombrables espèces à prendre au leurre de surface !
